Quels CCUS pour la transition énergétique?

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Submitted by bchatelet on Fri, 09/24/2021 - 22:57
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Colonne de décarbonation d'ammoniac

CCUS est l'acronyme de Carbon Capture, Utilization and Storage. Il recouvre à la fois les techniques de capture du CO2 puis de stockage (CCS) et celles de capture en vue d'une transformation en un autre composant réutilisable (CCUS), avec ou sans rémission de CO2 ultérieure. La capture du CO2 pour la transformation en méthanol est un exemple parmi d'autres de CCU. Le cout du captage du CO2 a été divisé en moyenne par 2 depuis 2014, ce qui rendent les CCUS de plus en plus compétitives(1) et inférieur en Europe au niveau de la taxe carbone en 2023(2). Même si l'AIE n'envisage pas un développement rapide de des technologies avant 2030 (3), il est permis de souligner leurs avantages immédiats(4), tandis qu'un certain nombre de pays en Europe ont déjà des projets CCS assez avancés (5, p27/62). L'objectif de décarbonation à l'horizon 2050 ne parait pas soutenable avec le fonctionnement des économies de marché, sans un large développement  des CCUS  (6). A défaut il faudrait laisser dans le sol les 3/4 des ressources fossiles recensées.

Dans l'idéal à l'instar de l'adage: "nettoyer c'est bien, ne pas salir c'est mieux", il vaudrait mieux diminuer la production de CO2 dans l'économie plutôt que d'essayer de la capter ensuite. Ces techniques sont néanmoins justifiées par des question de coût. En effet par exemple comme cela est mentionné dans l'article "quelle production électrique dans les 5 prochaines années", il n'est par exemple  quasiment pas possible techniquement de fournir d'ici 2027 en France le niveau de puissance électrique additionnel nécessaire pour remplacer les énergies fossiles de l'industrie manufacturière par de l'énergie électrique (7, 1 min)

Si l'on s'oriente vers une économie zéro carbone il n'est pas possible dans un système électrique non sur-dimensionné et comportant des énergies renouvelables intermittentes (8) (9) ou nucléaires (10, p31/185) de ne pas envisager l'utilisation de centrales thermiques d'appoint palliant l'intermittence et associées à des techniques de CCUS (méthanation), à moins d'utiliser de façon importante le pompage-turbinage. C'est d'ailleurs l'intermittence des moyens de production électrique qui explique que le secteur qui a connu l'augmentation du taux de Co2 la plus importante depuis 2014 en France est celui de la production d'électricité, à cause de l'arrêt de certaines tranches de centrales (11, p42/158)
L'AIE a comme prévision (12 ,4min49) d'ici 2060 la capture de 115Gt de CO2 par les CCUS d'ici 2060,  c'est à dire 4 fois la quantité de CO2 émis sur la planète au cours de l'année 2020. Comme l'indique le centre UKCCSRC:"CCS is a necessity, not an option, for reaching net-zero GHG emissions" (13). Il existe déjà de nombreux sites de séquestration du carbone(14) comme l'indique aussi le dernier rapport du réseau Co2geonet (15).

Les techniques sont nombreuses, le domaine est vaste et en pleine expansion, aussi donnons juste quelques points de repères.
Techniquement 90% des émissions de C02 générées par les processus industriels à grande échelle peuvent être capturés. Alors que le prix du Co2 est évaluée en 2022 à 80Eur/t, la plus part des procédés de capture ont des coûts inférieurs (16).

Les fermes d'aquaculture cynobactériennes (17, p209) pour la capture du CO2 ou la production d'algo-carburants (18) (19)  restent peu développés. La société Algenol produit du bio-diesel pour environ 0.35Eur/l (20) (21), à comparer avec un prix moyen à l'exportation en 2018 de 0,47Eu pour l'éthanol (22, p59/258). En particulier le butanol peut être utilisé dans tous les véhicules à essence sans modification (23) (24)., tandis que la conversion serait possible à partir de presque n'importe type d'algues (25). La conversion de l'éthanol en Butanol est possible avec un rendement proche de 95% (26) mais elle double environ le cout de production de l'éthanol (27).  Cependant pour remplacer les 42 Milliards de litres de consommation annuelle de carburants en France (28) qui produisent par unité de surface entre 10 et 100 fois plus que l'éthanol, il suffirait d'une surface comprise entre 42/584*[30000-90000]=[2130-6400]km2 (29) (30).  Cette superficie représente environ 32% à 95% de la superficie du Finistère (31) et serait associé à un bilan carbone réduit, proche d'une réduction de 40% (1/3 du Co2 émis est récupéré dans l'eau de mer (32), tandis que la combustion de l'éthanol émet en moyenne 5% de co2 en moins (33) ). La transformation de 0,5% de la zone exclusive Française pour la culture d'algues permettrait de produire annuellement l'équivalent de la  consommation européenne de méthane (34).  Le rendement par hectare de la culture des algues pour produire des carburants est 5 fois plus élevé que celui de l'éthanol (35, 5.4.3).  La production de phytoplancton pour la production d'algo-carburant serait d'autant plus justifiée qu'on observerait une baisse moyenne de la concentration depuis les années 80 (36) qui contribuerait pour une bonne part au réchauffement climatique. Enfin, le traitement des eaux (37) (38) à l'embouchure des rivières permettrait en recyclant les Nitrates et Phosphates en biodiesel de diminuer les risques de proliférations de marées vertes, en s'inscrivant dans des plans existants (39). Les calculs de rentabilité de ces algo-carburants pourront aussi intégrer les externalités liées aux dommages sur l'environnement et le tourisme  (40) provoquées par les algues vertes.  Avec une réduction de 70% en moyenne du bilan carbone par rapport aux carburants (41), les algo-carburants ont surement un rôle à jouer par exemple dans l'aviation où il n'y a pas à ce jour de meilleure solution technique que des carburants de substitution. En effet, 1/3 du CO2 émis dans l'atmosphère étant dissous dans les océans (42), l'utilisation des algo-carburants correspond donc à environ à 40% de réduction des émissions des GES des carburants, s'ils n'utilisent que le CO2 de l'eau de mer. Leur bilan carbone reste alors moins bon que celui du e-méthanol ou du Power2Gaz, qui permet d'éviter l'émission dans l'atmosphère de 100% du CO2 utilisé (sauf si des techniques sans émission de CO2 étaient utilisées par l'industrie manufacturière).

D'après l'AIE il n'y avait en 2020 que 18 installations de type CCUS à grande échelle dans le monde qui permettaient toutefois de capter 33 millions de tommes de CO2, ce qui représente au niveau mondial 0,1% des émissions, mais aussi presque l'ensemble de celles de l'industrie manufacturière Française (43, 4min).

Si le coût à la tonne des techniques de CCS (stockage) est estimé en 2021 à environ 60$/t (44) (45, p 10/15) alors il semble assez simple d'observer que le niveau de taxation de la tonne de carbone des pays les plus émetteurs devrait être au moins de 60$/t pour créer une incitation à l'utilisation de ces techniques. Ce dernier coût pourrait même être plus faible dans certains projets pilote (46). Ce seuil devrait toutefois être atteint en 2022 (47) en France et en 2026 en Allemagne (48). A défaut d'une telle augmentation l'État devrait sans doute affecter une partie des fonds collectés par la taxe carbone à des aides permettant de rentabiliser pour les industries concernées les dispositifs de stockage. En Chine il n'y aurait pas en 2021 de perspective de taxation au dessus de 20$ (49) et aux États Unis non plus (50, p4/4). Dans l'union européenne seuls les pays d'Europe du Nord étaient au dessus de ce seuil. L'absence d'accord sur le niveau de taxation dans le marché européen qui a adopté le principe du libre échange  créé implicitement des distorsions de concurrence, qu'il faudra bien résoudre soit par un accord commun, soit par l'autorisation de rétablir des droits de douane qui rétabliront un équilibre intégrant d'éventuelles différences de coûts entre une production décarbonée ou non.

Pour autant on constate un très faible développement en 2021 en Europe (51, 47 min-) (4aa) des projets de stockage (Norvège) , et uniquement dans les anciennes poches d'exploitation de gaz et de pétrole. En France, il n'y a aucun projet de ce type, l'ancien gisement de gaz de Lacq (52) (53) n'a pas été à ce jour exploité que partiellement et pendant 5 ans seulement par Total pour les CCS (54). Des usines très émettrices comme celles de production d'hydrogène ou d'électricité à partir du méthane ou de biogaz (55)  ne profitent donc pas en 2022 de cet espace de stockage en libre accès. Ceci d'autant qu'il pourrait aussi devenir un site pilote pour le développement des techniques de bio-méthanation (56); que le niveau à 60$/t C02 de la taxe carbone rendrait  le projet rentable et qu'il est par ailleurs éligible depuis 2013 au dispositif des "investissements d'avenir" (57) . Il y a également de nombreux autres sites qui pourraient être exploités pour le stockage, principalement dans le Bassin parisien, le Bassin d'Aquitaine et le fossé Rhénan (58) alors que l'ile de France et la région Aquitaine sont plutôt des régions à fortes émissions (59).

La production d'électricité à partir du gaz émet au moins 2 fois moins de Co2 qu'à partir du charbon (60). L'Allemagne a donc misé sur utilisation assez massive du gaz avec un engagement à sortir du charbon d'ici 2030 (61) (62) (63) et une augmentation de la taxe carbone à 60Eur d'ici 2026 (64). Cette dernière augmentation permettra d'aligner la taxation Allemande avec celle de la moyenne européenne (65). Or, en Décembre 2021, le prix du gaz en Europe a atteint des sommets à 180Eur/t (66). Avec le système de fixation des tarifs réglementés du prix de l'électricité sur le marché européen à partir de "la dernière  centrale allumée" (67) , on a assisté corrélativement à une explosion du tarif réglementé (68) (69) alors qu'une baisse du tarif est anticipée à partir de 2023 sur la base d'une possible baisse à cette date du prix du gaz. 
Or la production d'un MegWh d'électricité à partir du charbon émet environ 1 tonne de Co2 (70) et on peut évaluer qu'indépendamment du cours sur les marchés internationaux la production d'un Megwh d'électricité à partir du charbon coute en Allemagne 50Eur/Meg (71, "parlons pognon pour l'énergie primaire"). Ce dernier prix est peu susceptible d'évoluer car il correspond essentiellement à des coûts de production pour une ressource disponible en Allemagne. Quand bien même le prix de vente sur le marché de la tonne de gaz redescendrait à 60Eur/t d'ici 2026, le prix du MegaWh produit à partir du gaz en Allemagne ne sera pas inférieur à 120Eur/MegWh (72, p11/22 Fig 9). Avec un coût de stockage de la tonne de Co2 par technique CCS de 60Eur/tonne Co2, il en résulte que l'Allemagne aurait intérêt à augmenter le coût de sa taxe carbone dés 2022 à 60Eur/t et de reporter à une date ultérieure à 2030 la fermeture de ses mines de charbon. La cour des comptes estimait aussi en 2021 que les CCs n'étaient rentables qu'à partir d'un prix de 60$/t Co2 (73, p38-39/104).  Les techniques de CCS sont en effet peu développées en Europe (74, p57/117). En effet cette augmentation lui permettrait:
-de réduire les distorsions de concurrence des coûts de production sur le marché européen de l'électricité par rapport à ses voisins, due aux différences des niveaux de la taxe carbone.
-de financer les dispositifs de captation CCS par les recettes de la taxe carbone à 60Eur/t, au lieu de dépenser dans des importations de gaz  l'équivalent de ces investissements potentiels (75) . Ceci pour un coût potentiellement inférieur: 50 (prix du MegWh à partir du charbon) +60 (taxe carbone) <= 110 (prix du MegaWh à partir du gaz en 2026). A défaut d'une augmentation généralisée de la taxe carbone en Allemagne cette dernière inéquation montre aussi le mauvais calcul économique que représente en 2022 la production d'électricité à partir du gaz. La captation du CO2 à petite échelle est une opération qui s'autofinance compte tenu du prix de vente de la tonne de CO2 (76, 10min57).
-de rendre compétitif, la production d'électricité à partir du charbon associé aux CCS en comparaison du gaz, tout en diminuant davantage les émissions de CO2.
Compte tenu des prévisions qui indiquent une demande croissante de gaz au niveau mondial au moins jusqu'en 2025 (77, p33/64), et des restrictions sur l'offre (78),   il est assez probable que le prix du MegaWh reste supérieur à 110Eur au moins jusqu'en 2025.
En France il faudrait que le prix du Mgwatt de gaz devienne inférieur à celui du charbon (50Eur/megwh) pour que le gaz présente un intérêt économique et écologique supérieur à ce dernier (79), dans la mesure où le niveau de taxe carbone appliqué en 2022 (80) est équivalent au coût d'enfouissement de la tonne de CO2. Cette étude évalue pour sa part le cout de la méthanation à 3,6 Eur/kg, c'est à dire 280Eur/MegaWh, qui semble constituer une estimation haute et à titre de comparaison reste inférieur au prix de l'électricité dans de nombreux pays européens en 2023 ou au prix moyen de l'électricité de gros sur le marché européen en 2022.

Une étude montre (81, p11/12) qui si l'on a moins 30% de solaire  (et plus généralement d'énergies renouvelables avec un facteur de charge voisin de 25%) , pour éviter le risque de blackout il faut toutefois dimensionner la puissance installée pour qu'elle soit 40% au dessus de la demande maximale, et qu'au delà de 30% de solaire on a un risque important. Or en 2021, en Allemagne on est déjà à 24% de production d'Enr avec un facteur de charge de 25 % (82)Avec un projet de doublement de la capacité de production des éoliennes terrestres d'ici 2030 (83) l'Allemagne sera donc aussi probablement à partir de 2030 dans l'incapacité de réduire ses sources d'approvisionnement d'électricité à partir des sources fossiles et de tendre vers une économie zéro carbone, si les CCS ne sont par ailleurs pas utilisés (84, p47/328). En effet ce seuil de 30% serait alors dépassé avant 2030. A défaut il lui faudrait plutôt privilégier l'éolien offshore plutôt que terrestre, avec cependant à la clef un problème important d'acheminement de la production entre le Nord et le Sud. 

Au delà des techniques de stockage il y a également les techniques de CCUS, qui pourraient être d'une certaine manière la traduction de l'équation E=M(aime)CO2. Ces techniques sont en plein développement (85) (86,p81/224).
En 2015, moins de 0,1% du CO2 émis était réutilisé (87, 3min). On observe aussi un retard technologique et/ou un défaut d'investissement dans la mise en œuvre des techniques qui n'est pas économiquement justifié. Ainsi par exemple en Angleterre en 2021, on a un déficit de production de gaz CO2 à l'industrie alimentaire (88)  dont le prix de vente est de 900$/t. Ceci alors qu'il serait rentable à partir d'un coût brut d'extraction inférieur à 60$ à la sortie des centrales thermiques d'extraire le C02 pour le commercialiser, avec un bénéfice estimé (hors coût de stockage et de transport)  à environ  900-60=840$/t. Un prototype d'usine parvient ainsi à produire du C02 destiné à l'industrie alimentaire à partir du biogaz pour un coût de 25Eur/t (89) tandis qu'une société a développé un procédé de captage du CO2 brut pour un coût de 30$/t (90) (hors purification, transport).  Ce dernier chiffre permet par ailleurs de s'interroger sur le modèle économique de production du CO2 pour l'industrie alimentaire à partir de l'ammoniaque en comparaison des techniques CCUS ?  
La validation de l'expérimentation Jupiter 1000, en France, a montré qu'une généralisation du captage de le CO2 émis par l'industrie et sa transformation en méthane est envisageable, d'autant que les sites d'émission sont assez concentrés: Normandie, région Nord, vallée du Rhône (91, 4h50).  

Concernant les produits les plus intéressants en termes économiques pour transformation du CO2 (CCUS), une étude (92) indique: 
"Les voies qui semblent viables, à haut niveau de maturité et adaptées à une mise en œuvre à court terme, impliquent la production
-de composés à faible prix unitaire, mais à volume de marché important, notamment: le méthanol, le méthane, les carbonates de calcium , les micro-algues, les carbonates de sodium, l'urée, le gaz de synthèse et l'éthanol. 
-les composés qui ont un prix unitaire élevé mais un faible volume de marché, tels que les carbonates de diméthyle, les polycarbonates , l'acide formique et l'acide salicylique."
 Dans le cadre de cet page, nous examinons uniquement les composés à volume de marché important: le méthanol, les carbonates de calcium et de sodium, l'urée, l'éthanol même si les autres types de produits peuvent être en réalité prioritaires car offrant une meilleure rentabilité. Une étude montre que les capacités d'utilisation du CO2 produit en Allemagne par 55 techniques de CCUS différentes dépasse la quantité de CO2 produite par l'industrie (93). Il faut identifier les procédés peu consommateurs d'énergie électrique compte tenu de la difficulté en France du réseau de fournir de l'énergie additionnelle.  Même si un certain nombre d'initiatives existent en France, celles-ci semblent insuffisantes (94, p28/116) en comparaison des objectifs.Il n'y a qu'un seul projet en France concernant le e-méthanol (95).

  • On peut produire du ciment ayant un bilan carbone négatif (96), à partir de caCO3 issu de la captation du CO2. Le ciment ainsi produit a un prix de revient comparable au ciment traditionnel quand il est produit à grande échelle (97, p441/559) . D'après le ministère de l'industrie britannique: "aucune technologie ne présente en pratique autant de potentiel de réduction des émissions que la capture et l’utilisation du carbone dans l’industrie du ciment" (98). Il n'y a pas tellement d'alternative aux CCUS/CCS pour la décarbonation de ce secteur alors que l'énergie n'entre que pour 1/3 des émissions de CO2 (99, p16/40). En réaffectant la totalité de la taxe carbone en subvention aux CCS/CCUS on peut éviter toute augmentation des coûts de production (100, p30/40).
  • On peut produire de l'ammoniac par une technique CCU amenant 98% de moins de GES que les procédés traditionnels (101) (102), qui pour la production d'une tonne amènent la production de deux tonnes de CO2 (103).   De plus il est probablement possible de transformer le CO2 provenant d'autres sources émettrices en urée à partir de "l'ammoniac vert" produit (104). En effet la production d'ammoniac en France représente 1,5 Mt (105) ce qui correspond à l'émission de 2-3 Mt de CO2 par 4 usines seulement (106).
  • On peut utiliser la méthanation pour produire du méthane avec toutes les industries très émettrices de CO2 (107) (108). Ceci permettrait probablement de diminuer  les importations de méthane, qui en 2019 on représenté 500Twh  pour un coût de 9 Milliards d'euros  (109, p28/156). Avec 8c/kwh en 2022 via la TICGN et environ 20c de tva (110) (111), il y a au moins 28c/kwh de taxe sur le gaz.  Le "méthane vert" aurait un coût de production égal au prix de vente au tarif réglementé en 2022 qui est voisin de 100Eur/Megwh (112), si l'on avait pas bloqué la TICGN au niveau de 2018. En effet, le coût de production du gaz obtenu par méthanation, taxe carbone déduite s'établit à  0,136c- 0,08c=0,128/kwh (18, 5.1) ou inférieur (113). Ces derniers chiffres montrent qu'en 2022,  l'état finance d'une certaine manière les émissions de CO2, via la Tva sur le gaz. Il suffirait en effet  d'exempter de tva le méthane vert (ou plus simplement d'augmenter de 20% la TICGN et de supprimer la tva) -tout en respectant les engagements pris sur le niveau de taxe carbone- pour que son prix de vente soit égal en 2022 à celui du méthane gris. Alors qu'un doublement du niveau de taxe carbone est envisagé d'ici 2030 (114), la mesure permettrait aussi de rendre cette augmentation supportable pour les consommateurs. Cette dernière mesure rendrait plus efficace la vocation première de la TICGN qui est de financer le gaz vert (115). En effet depuis la loi de finance 2017, la totalité des recettes de la Ticgn est affectée au budget de l'état (116) alors qu'auparavant une quote-part allait vers la transition énergétique (117). Depuis 2021 avec la suppression du compte de l'État CAS (compte d'affectation de la transition énergétique) et l'affectation des recettes de taxation écologique (118) vers le compte  service service public de l'énergie (119), le fléchage des recettes de taxation est beaucoup moins clair, quand il n'est pas affecté à un soutien à la consommation d'énergies fossiles (bouclier tarifaire). Le gaz résidentiel représentait en 2019, 41% de la consommation  Française (120, p125/156). Il existe cependant assez peu de projets de ce type en France (121) (122) . Il y a aussi des projets de méthanation biologique (123), qui peuvent  être considérées comme des projets de méthanisation avancés. En effet, lorsque  qu'ils sont concomitants, on a une réduction notable de l'émission de CO2 issue de la méthanisation (124) (125).
    Ainsi alors que 60% de la consommation de gaz sert en France au chauffage domestique (126), on peut imaginer un schéma énergétique dans lequel:
    -la consommation pourrait être réduite pour une bonne part par l'utilisation de pompes à chaleur (127) (128, p188)
    -le biogaz pourrait représenter en 2050, 1/3 de la consommation de 2023 (129, p32). Si on rend la capture du CO2 lié à la méthanisation obligatoire, ou que l'on soumet celle-ci au niveau moyen de la taxe carbone en Europe (130), alors la méthanation associée à la méthanisation deviendrait quasi-systématique tout
    en multipliant la production de biogaz par 2 (131) (132).
  • On peut produire de l'éthanol à partir du Co2 par des procédés d'électrocatalyse, pour un coût proche du prix de l'essence en France (133, par. 4) (134, 4.3) en 2023. L'avantage de ce procédé est la conversion du CO2 vers l'éthanol dans la proportion de 1 à 3,5 (135, p6/8).



    En conclusion, on voit que les techniques de CCUS semblent être la meilleure approche pour limiter rapidement l'émission des GES à condition toutefois : d'accroître la maitrise technique des procédés; de privilégier les procédés les moins consommateurs d'énergie et les plus rentables; de prévoir les financements appropriés pour amortir dans la durée des investissements importants; de s'accorder sur un prix minimum de taxation du carbone dans le cadre des échanges commerciaux . Le volet décarbonation prévu dans le plan de relance 2030 (136, p350/458) se limite à 1,2Milliards d'Euros. Ce dernier montant ne permettra de financer qu'une toute petite partie des investissements nécessaires, et permet de s'interroger sur le rôle que se donne l'État dans ce domaine: doit-il prioritairement organiser, normaliser ou financer?

    Il est toutefois probable que le stockage géologique du Co2 malgré les difficultés techniques qu'il implique reste pour les industries les plus émettrices la solution la plus rapide et la moins couteuse à réaliser(137) (138).  Ainsi, 39 % (139, p6/14) des Ges proviennent en 2019 du Charbon et sa combustion sans émission de CO2 peut est obtenu par CCS pour un surcoût assez raisonnable de 60$/t (140, p 8/11) . Même en Europe, en 2018, 28% des émissions venaient du Charbon (141). De même on pourrait réduire sans grande difficulté technique 60% des émissions de CO2 provenant de l'utilisation du pétrole dans les transports (142) , soit 0,6*30=18% des émissions de GES en le remplaçant par du e-méthanol. Il suffit pour cela par exemple de produire ce e-méthanol à partir des 12% d'émissions de CO2 provenant des procédés industriels et des 35 % de gaz naturel utilisés pour la production d'électricité (143) (soit 0,35*19=6,6%). En réalité il est moins onéreux de remplacer une partie des transports thermiques par des véhicules électriques que d'utiliser du e-méthanol, mais cela peut constituer une solution complémentaire (véhicules hybrides e-méthanol..). On voit donc qu'une réduction importante des Ges pourrait techniquement être faite assez rapidement s'il y avait une réelle volonté politique (144).  Le niveau de la taxe carbone est par exemple insuffisant en 2021 en Allemagne (sauf après 2025 -145-) et aux États-Unis pour le financement de tels projets (146). En 2017, il fallait par exemple une taxe carbone au minimum de 50$/t pour que les technologies CCS soient rentables dans la production d'électricité à partir du charbon en Chine (147, p8/9). En France la taxation était en 2021 inférieure à ce seuil en particulier pour le kérosène et le fioul domestique (148), alors que ce dernier carburant correspond au mode de chauffage le plus émetteur de CO2 (149), tandis que l'avion émet au km parcouru 30 fois plus de Co2 que le train (150) . C'est cependant probablement au niveau de l'Omc qu'une discussion sur le niveau minimal de la taxe carbone pourrait intervenir (151).

 

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